On l’a vu, l’album se conclut alors que Karl trouve un
emploi au «Grand Théâtre de la
Nature d’Oklahoma», qui serait apparemment the biggest in the World. Cet improbable
théâtre, situé au fin fond de l’Oklahoma, mais qui recrute sans cesse du
personnel aux quatre coins du continent, est bien sûr une pure invention de
Kafka. On peut y voir ce que l’on veut. Pour moi, c’est une allégorie de
l’Amérique conquérante de l’époque, avec ses possibilités illimitées, ses
immenses territoires encore à développer, mais aussi avec ses contradictions et
ses tensions raciales. C’est un peu le «Buffalo
Bill’s Wild West Show», c’est un peu le cirque Barnum, c’est Hollywood à
ses débuts.
C’est ce que j’ai cherché à montrer à la page 156, où le fil
du récit est suspendu pour faire place à un montage d’images diverses,
destinées à donner aux nouveaux employés un aperçu de ce qu’est le Grand
Théâtre de la Nature.
À propos d’Hollywood, j’ai inclus quelques références à
l’œuvre de D.W. Griffith, pionnier du 7e Art, qui a réalisé il y a
un siècle les premiers blockbusters hollywoodiens,
dont le grandiose «Intolerance», film
à message mégalomane s’étendant sur plusieurs époques, avec entre autres un
épisode babylonien absolument délirant.
Il est aussi l’auteur de l’épique et controversé «Birth of a Nation», peut-être le premier
chef-d’œuvre du cinéma, mais en même temps politiquement indéfendable. Dans le
récit, situé autour de la
Guerre de Sécession et qui adopte le point de vue sudiste, on
fait l’apologie de la ségrégation raciale, en rendant hommage aux fondateurs du
Kuklux Klan, rien de moins.
Curieusement, Griffith ne se voyait pas lui-même comme un
raciste. On peut mettre ça sur le compte de l’époque, mais tout de même ... On
a crucifié Hergé pour moins que ça.
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